ma vie et mon rêve
Oubli.
Déni.
Refus.
Pensées magiques (cf chez Coccinelle).
Recul.
Prise de hauteur.
Je ne sais pas comment j'ai fait ça, mais même si l'envie d'avoir des enfants est bien évidemment toujours là, je commence à vraiment réussir à accepter ce qui m'arrive. Ok je dis ça maintenant, peut-être que dans trois jours ce sera autrement. N'empêche, je m'habitue à me définir comme une femme sans enfant. Sans être jalouse des femmes avec enfants. Sans comparer. Ca me fait du bien, de pouvoir me définir à nouveau sans comparer et sans me dévaloriser.
Quand je résume où j'en suis dans la vie : je suis une femme de 31 ans qui vit une belle histoire d'amour, qui a un bon boulot vraiment sympa avec plein de collègues super et pas mal de possibilités d'évolution. J'ai une belle maison avec un joli jardin dans lequel poussent des potirons. J'ai une famille que j'aime, qui m'aime et tout le monde est en bonne santé. J'ai une petite nièce adorable qui m'apporte beaucoup de bonheur. Et je n'ai pas d'enfant.
Ce n'est pas "pas encore" ni "malheureusement pas d'enfant". C'est "pas d'enfant", point. Un jour, ça changera peut-être, mais pour l'instant c'est comme ça et je progresse car cette toute petite phrase ne me fait plus aussi mal. Ne me met plus mal à l'aise vis-à-vis des autres. Je ne me dis plus "je n'ai pas d'enfant, parce que je suis nulle-stérile-inutile-incompétente-malade".
Dans cette attente, ce qui est dur, ce n'est pas l'attente. C'est l'incertitude, la possibilité, l'éventualité, l'absence de diagnostic. Comme si on vous disait que vous avez une maladie mais qu'on ne peut pas vous dire si ça va guérir ou si vous allez souffrir toute votre vie. Vous êtes partagée entre l'espoir et le renoncement, l'acceptation.
Cette attente nous prépare à accepter la stérilité définitive. Chaque mois, c'est un peu plus présent. Si on me disait aujourd'hui "tu n'auras jamais d'enfant", ce serait moins dur à entendre qu'il y a deux ans.
Malgré tout bien sûr, l'espoir est toujours là, heureusement. Enfin, un peu, en tout cas. Moins fort, moins sûr mais il est bien là.
Un peu comme si j'avais très envie de gagner au loto, que je jouais toutes les semaines en espérant à chaque fois, en étant déçue à chaque fois. Aujourd'hui j'essaie d'arrêter de penser à "quand je gagnerai" parce que si ça se trouve, ça n'arrivera pas. J'essaie de vivre mon quotidien en continuant à jouer toutes les semaines, on ne sait jamais, ce serait trop bête d'arrêter maintenant. Mais je dois vivre comme si je ne devais jamais gagner. Sinon, le quotidien est insupportable. Vivre en attendant continuellement que quelque chose arrive. Ce n'est pas possible. Ca bousille mon cerveau, je ne sais plus si je vis ma vraie vie, la vie réelle en ce moment et ici, ma vie de femme trentenaire sans enfant, ou ma vie rêvée, celle où je serais une maman comblée.
Dans ma vie de trentenaire sans enfant, il y a Le Tigre, bien sûr et tout ce qu'on vit ensemble. Il y a le sport aussi, le yoga, les balades en VTT dans la forêt d'Ermenonville, il y a ces pains que je fais et qui sentent bon lorsqu'ils cuisent dans le four. Et tant d'autres belles choses...
Alors je vais essayer de vivre ma vraie vie maintenant. Quelle qu'elle soit. Arrêter de vivre dans le rêve sans arrêter de me battre pour réussir. Dur pari.